L'affaire en question oppose l’Etat, représenté par le Ministre de l'Aménagement du Territoire et de l'Environnement, à plusieurs exploitants de pisciculture. Le Conseil d'Etat, après avoir annulé le jugement du 29 avril 1997 du tribunal administratif d'Orléans, a désigné la CAA de Bordeaux pour connaître du jugement de cette affaire.
En l'espèce, des exploitants de pisciculture reprochent à l'Etat de ne pas avoir agi afin de limiter la prolifération des grands cormorans, espèce protégée par la loi du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature, et créant ainsi un préjudice à leur élevage.
La Cour estime que lorsque le préjudice excède les aléas inhérents à l'activité en cause, il revêt un caractère grave et spécial et ne saurait, dès lors, être regardé comme une charge incombant normalement aux intéressés.
La Cour considère ainsi que les exploitants qui invoquent les dommages causés à leurs élevages sont recevables à demander à l'Etat réparation du préjudice subi du fait de la prolifération de ces animaux sauvages, sur le fondement de la rupture d'égalité devant les charges publiques. En effet, les pouvoirs publics n'ont pris aucune mesure de limitation, comme les y autorise pourtant la directive communautaire du 2 avril 1979 concernant la conservation des oiseaux sauvages et l'arrêté interministériel du 17 avril 1981.
La CAA de Bordeaux juge donc qu'il appartient à l'Etat de gérer la prolifération d'espèces protégées afin de ne pas créer une rupture de l'égalité devant les charges publiques, et le condamne pour carence à payer des dommages et intérêts pour le préjudice subi par les pisciculteurs.